Les petites sœurs de Bethléem

C’est le 1° Novembre 1950, alors que le Pape Pie XII promulgue solennellement le dogme de l’Assomption de la Vierge Marie au ciel, c’est-à-dire qu’il déclare que la jeune fille de Nazareth qui a mis au monde Jésus, le Fils de Dieu devenu Homme, est passée de la vie à la Vie, de la terre au ciel, non seulement avec son âme mais aussi avec son corps. Cette déclaration suscite une immense joie car elle fortifie la foi chrétienne en la résurrection finale.

Parmi les centaines de milliers de personnes qui participent, sur la place saint Pierre de Rome, à cette proclamation solennelle de l'Assomption de la Vierge Marie, se trouvent quelques pèlerins français. Certains parmi eux sont particulièrement saisis par l’ampleur et la beauté du Dessein de Dieu tel que Saint Paul l’exprime dans le prologue de l'épitre aux Ephésiens : "Dès avant la création du monde, Dieu nous a élus en son Fils afin que nous nous tenions en sa présence, saints et immaculés dans l'Amour".

Il s'établit en leur cœur une relation entre la présence de Marie élevée dans la Gloire du Père avec son Fils, et ce projet du Père d'appeler tous les hommes et femmes de bonne volonté de toutes les générations, à se tenir en présence du Père sur la terre comme au ciel.
Ils décident de consacrer toute leur attention à ce qu'ils appellent le "Projet de la Vierge" et de le servir de toutes leurs forces vives.
C'est ainsi qu'en 1951 une petite communauté de femmes consacrées commence à vivre dans le secret d'un village près de Sens en France, afin de découvrir ce "Projet de la Vierge" en le vivant.

La première chapelle trouve sa place dans une ancienne étable où les sœurs aiment prolonger dans le silence l’adoration commencée par la Vierge à Bethléem. C'est pourquoi la communauté naissante reçoit spontanément le nom de "Bethleem".
Depuis, gratuitement, sans aucune autre raison que celle de l'Amour du Père, du Fils et du Saint Esprit qui les attire, les sœurs de Bethléem désirent, minute après minute, se laisser attirer dans le Feu brûlant du Cœur de la Vierge Marie qui sans cesse au ciel "se laisse chercher par le Père dans une adoration en esprit et vérité"( Jean 4,23)

C'est pourquoi la communauté reçoit aussi le nom de "moniales de Bethléem et de l'Assomption de la Vierge".

Afin d'incarner authentiquement cette vie "sur la terre comme au ciel", les sœurs de Bethléem reçoivent la sagesse de vie des "Laures" des déserts orientaux des premiers siècles dont l'expression occidentale est manifestée dans la vie simple, solitaire et silencieuse des fils de saint Bruno vivant en des ermitages reliés entre eux par un cloître situé autour d'une église, signe de leur profonde communion fraternelle et liturgique.

Le nom complet de la communauté est donc "moniales de Bethléem, de l'Assomption de le Vierge et de saint Bruno."

Les moniales ont choisi de demeurer dans un ermitage où le silence et la solitude favorisent la rencontre avec Dieu comme en témoignent déjà les grands orants de la Bible. La solitude la met face à Dieu et face à elle-même, et la conduit à faire l’expérience de ses limites et de son péché ainsi que de la grâce et de la miséricorde de Dieu. Exceptées deux fois le jour où les moniales sortent de leur cellule pour se rendre à l'église du monastère et célébrer la liturgie communautaire de Matines suivie de l'Eucharistie ainsi que celle de Vêpres, chaque moniale demeure dans sa cellule. Là, avant le point du jour, elle veille solitaire en présence de Dieu, profondément désireuse d'offrir à Dieu Lui-même, et à sa Miséricorde infinie enveloppant toute personne humaine, les moindres gestes et pensées de sa journée : lorsque, dans une écoute tranquille du cœur, elle laisse Dieu libre de la rencontrer à tout instant, lorsqu'elle berce en son cœur la Parole de Dieu, lorsqu'elle se laisse interroger par la Lumière divine des textes sacrées et de la tradition de l'Église, lorsqu'elle célèbre la Liturgie des petites Heures, lorsqu'elle prend ses repas, lorsqu'elle travaille, lorsqu'elle dort.

Jamais des disciples de Saint Bruno n’avaient encore été appelés au Canada, lorsque les sœurs de Bethléem, de l’Assomption de la Vierge et de Saint Bruno commencent un monastère en 1993. En ce sens on peut dire que c’est une nouveauté absolue au Canada.

Il est vrai que notre mode de vie humble et caché est en contraste avec le mode de vie en Amérique du Nord. Est-ce pour autant qu’il est en contradiction ? peut-être pas… tant de jeunes ou d’adultes de cette région sont en recherche du sens de leur vie, souvent nantie et confortable mais où leurs cœurs demeurent en soif de l’absolu que chacun porte au fond de lui. Notre Famille monastique n’a pas eu l’initiative de prendre contact avec le diocèse ou le sanctuaire. Ce sont des amis laïcs qui ont demandé que des sœurs de Bethléem viennent au Canada et qui ont eux-mêmes fait les premières démarches auprès de Monseigneur Lussier et de certaines communautés religieuses pour trouver un lieu qui conviendrait pour la vie monastique de silence et de solitude, selon la sagesse de vie de Saint Bruno. Les Pères Missionnaires des Saints Apôtres et une personne particulière ont offert un splendide terrain solitaire et silencieux dans la montagne, à proximité du sanctuaire de Marie Reine des cœurs. Notre présence auprès de ce sanctuaire est donc une coïncidence et non un choix délibéré.

Les lieux que le Seigneur prépare sont généralement beaux et même très beaux, mais ce n’est pas un facteur qui détermine la fondation d’un monastère. La beauté de la création fait spontanément remonter au Créateur, elle est donc source de prière et d’action de grâce, c’est vrai très spécialement dans cette forêt canadienne dont les couleurs automnales sont de feu, et l’hiver enveloppé de silence par un épais manteau de neige.

Comme tous les évêques, Monseigneur Lussier ne donne pas de mission spéciale à des moniales contemplatives dont l’unique but est de prier tout le temps. Il nous accueille avec beaucoup de sollicitude - ainsi que toute l’Église locale - dans notre propre charisme et souhaite que ce charisme puisse s’enraciner et s’épanouir dans son diocèse en portant des fruits – la plupart du temps invisibles – pour la vie de l’Église de Joliette et pour l’Église universelle. La raison d’être d’un monastère de vie contemplative ne peut être que de proclamer par son silence que Dieu suffit à combler des vies et qu’Il est Don d’Amour gratuit.

Sur le fond, la vie au monastère de Chertsey ne diffère pas de celui de tous les autres monastères de notre Famille Monastique.
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