Jean-Jacques Perrut, biologiste et écrivain

Le biologiste est, par définition, la personne qui étudie le vivant. En tant que spécialiste du vivant, il peut exercer dans le public ou dans le privé. Le métier de biologiste en secteur privé est un métier qui a connu de fortes transformations depuis les années 70. Comme beaucoup de domaines scientifiques, elle a eu une automatisation exponentielle et désormais la démarche scientifique tend à se limiter à l’interprétation des résultats. Jean Jacques PERRUT biologiste de carrière nous donne sa version et son recul sur le métier qu’il l’a fait vibrer durant toutes ces années. Pour lui, le biologiste ne doit pas se couper de l’humain et l’automatisation n’est donc pas forcément un progrès. Le professionnel ne doit pas seulement se contenter d’analyser les résultats sans prendre en compte le ressenti du patient. C’est ici que se trouve toute la problématique du métier de biologiste. Au cours de cet article Jean-Jacques Perrut, biologiste émérite à la retraite, nous fait part de sa vision de ce métier passionnant à tous les égards. Son œil aiguisé analyse l’évolution de la profession sous un angle critique et remet en question la place que l’automatisme a pris sur l’humanisme avant de questionner la méthode expérimentale, processus au cœur du métier de biologiste.

Comment est-on passé de l’humanisme à l’automatisme ?

Mr PERRUT est un scientifique qui peut compter de belles années d’expertises et de reconnaissance de la profession. C’est avec un œil critique mais ouvert qu’il fait le constat de l’évolution de son métier et des mutations qu’il a pu subir durant ses 35 ans de carrières en tant que biologiste libéral. Il a également passé 15 ans en tant que chercheur. Jean Jacques PERRUT ne remet pas en cause ces avancées et les salues car elles ont permis une meilleure prise en charge des patients et une augmentation des réussites de traitements suite à ses nouvelles technologies. Il reconnait des biens faits positifs aux EPU (enseignement post-universitaire), aux FMC (formations médicales continues), aux DPC (développement professionnel continu), et enfin aux (DU (diplômes universitaires) qui permettent aux personnes sur le terrain d’actualiser leurs connaissances. Connaissances qui évoluent rapidement, surtout durant ces dernières années. Les connaissances doivent profiter à tout le monde, surtout dans le cadre d’un laboratoire de biologie médicale où l’on traite de domaines comme la biochimie, l’immunologie, la sérologie, la microbiologie, la parasitologie et l’hématologie.

Avec toutes les nouvelles méthodes de prélèvements, Mr PERRUT essaye de mettre en garde les futures générations de biologiste que leur métier n’est pas seulement un métier technique ou scientifique coupé de l’humain. Il faut entretenir une relation de confiance et un lien social avec les personnes venant faire des analyses ou prélèvements. L’automatisation du fonctionnement et des techniques ne doit pas effacer la main du technicien. Comme il le sera stipulé plus bas, il est impossible d’automatiser les prélèvements. Chose bien heureuse car c’est le moment ou le biologiste apprend à connaitre son patient et à émettre des hypothèses quant à son cas. La démarche scientifique ne doit pas se limiter à l’interprétation des résultats. Entreprise qui sera rendu plus difficile si le biologiste ne connait pas assez son patient. Il faut conserver une âme et un esprit de chercheur afin de rester ouvert et en alerte à toutes les hypothèses et idées qui pourraient découler des observations. Le biologiste doit se laisser guider par la démarche et la méthode expérimentale. Si l’automatisme a déjà pris le pas sur l’humaniste, il ne faut pas que ce dernier soit totalement effacer de la biologie médicale.

La méthode expérimentale au cœur du métier de biologiste ?

Pour Jean Jacques PERRUT la question ne se pose même pas. La méthode expérimentale doit rester au cœur du métier de biologiste et peut être divisée en 3 temps bien définis.

  • Le premier temps est l’établissement des faits. Cette étape permet de suggérer et de dégager des idées. Tous ces faits étant établis à partir de la fine observation. L’observation permet de bien comprendre sur quoi va devoir intervenir le biologiste en établissant un diagnostic et mettre en place le protocole adéquat pour intervenir. Dans le cas d’une plaie qui commence de la taille d’une pièce de 1 centimes puis, passe à la taille d’une pièce de 2 centimes pour finir à la grandeur d’une pièce de 2 euros, je peux observer que le centre est déprimé, altéré voire purulent alors que le pourtour est peu différencié du reste de la peau. Ce sont les faits.
  • Le deuxième temps est celui de l’analyse des faits que l’on vient de recueillir. Ces faits ne parlent pas d’eux-mêmes et il faut expliquer leur naissance par des hypothèses qui vont permettre de dégager et faire émerger des idées. Si l’on reprend l’exemple de la lésion, il est possible de penser que ce n’est pas un germe au centre de la lésion qui de temps en temps va à la périphérie de la peau saine mais l’inverse. Un germe à la périphérie de la lésion qui s’étend par voisinage sur la peau saine. On peut émettre l’hypothèse que le centre est constitué de cadavres de bactéries qui ont pu former un afflux leucocytaire qui aurait constituer le pus. Pus qui peut servir de terrain de développer à un germe différent du premier et donner lieu à une surinfection.
  • Le troisième temps serait celui de l’analyse par l’expérience pour infirmer ou confirmer les hypothèses et ainsi pouvoir valider l’idée sous-jacente. L’expérience ou comme on pourrait dire la vérification expérimentale serait une observation provoquée afin de contrôler l’hypothèse qui dirige l’idée. Ainsi pour notre exemple, il s’agirait de faire deux prélèvements, un au centre et un en périphérie, pour vérifier l’idée qu’il y a deux agents pathogènes. Un responsable de la lésion elle-même et l’autre de la surinfection.


Par cette exemple, Mr PERRUT veut mettre en lumière le fait que beaucoup de nouveaux techniciens ne prendraient pas la peine de faire les deux prélèvements et se contenteraient d’en choisir un des deux. La démarche expérimentale est donc tronquée et amenuisée, ce qui rend le travail du biologiste inefficace. Il fait remarquer qu’il n’y a plus que les prélèvements qui ne soient pas automatisés et que c’est la seule manière pour le biologiste de prendre connaissance du cas du patient.

Jean Jacques PERRUT a écrit de nombreux essais et ouvrages sur le sujet et reste une référence dans le domaine de la biologie médicale. Malgré son retrait de la vie active, il garde son esprit de chercheur et sa passion pour son métier qui a motivé toute sa carrière de scientifique. Il peut donc faire un bilan positif de la profession de biologiste et espérer une belle association des futures technologies et de la prise en charge de la patientèle. Comme le dit le professionnel, la relation à l’humain n’a pas changé et n’est pas prête de changer car « il s’agit d’une profession médicale et de la santé d’un patient à qui il faudra toujours annoncer la mort d’un fœtus, la reprise d’un cancer, une infection maligne, le développement de métastases, la leucémie de l’enfant, etc… »
Scientifique dans l’âme, Jean-Jacques Perrut est aussi passionné par la littérature et a notamment écrit plusieurs ouvrages, scientifiques ou non : « Risques et Menaces biologiques » et « Faut-il déboulonner Pasteur ? », « À l’ombre de l’auréole » ou encore « Le vin dans la Bible ».

Les différents ouvrages littéraires de Jean-Jacques Perrut

Dans son premier essai « Risques et Menaces biologiques » paru en 2003, l’homme de science analyse les différents risques biologiques en les distinguant en deux catégories : les risques biologiques naturels et les risques biologiques accidentels. Ces armes, que l’on pense assez récent, remontent en fait à l’Antiquité. Dans cette ouvrage Jean-Jacques Perrut en dresse le portrait. « Le vin dans la Bible », un autre ouvrage du biologiste permet de découvrir la place de cette boisson et sa symbolique dans le texte de références du christianisme. En véritable passionné d’œnologie, il mêle sa foi religieuse et sa passion pour les textes saints pour tenter d’expliquer au lecteur les aspects bibliques du vin : est-il approuvé ou désapprouvé ? Est-ce une bénédiction ou une malédiction ? est-il fermenté ou est-ce un simple jus de raisins ? Le troisième ouvrage de Jean-Jacques Perrut, « A l’Ombre de l’Auréole » plonge le lecteur dans le monde scientifique de la fin du XIXème siècle. Il traite de l’histoire de familles rurales modestes de la Dombes et du Beaujolais proches de Claude Bernard, éminent physiologiste, et de Jean-Marie Vianney, Saint curé d’Ars. Ce livre lui tenait particulièrement à cœur car le scientifique descend directement de ces familles et possède même deux liens de parenté proches avec Claude Bernard. Enfin, dans son essai « Faut-il déboulonner la statue de Pasteur ? », le biologiste ne remet pas en cause les travaux de Louis Pasteur mais il souhaite juste redonner un peu de visibilité aux scientifiques de l’ombre qui ont permis à cette figure emblématique d’être considérée comme le père de la microbiologie aujourd’hui. En effet, c’est notamment grâce à des hommes comme Adrien Loir, Marcellin Berthelot ou encore Pierre Victor Galtier que les recherches de Pasteur ont pu être menées à bien.

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D'autres liens pour en apprendre plus :
l'évolution du métier de biologiste selon Jean Jacques Perrut
Biographie de Jean Jacques Perrut

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